What is love

baby don't hurt me no more


Summer

« Puck. PUCK ! » La gamine le toise de ses yeux rieurs et anciens. Ses jambes grêles pendent dans le vide s’agitent un peu. En contrebas, les falaises de Yesnaby, au loin la lande hospitalière. Son frère a couru, elle peut s’en apercevoir. Le rouge aux joues, il tient serré dans sa main un parchemin chiffonné. L’encre a même un peu bavée par endroit, là où sa paume entre en contact. « T’es pas si débile que t’en a l’air, en fait. C’est pas moi qui le dit, c’est Aongas.  La dirlo vient d’envoyer une lettre pour toi. L’année prochaine, on est obligé de t’emmener. » Sinéad a l’air aussi enthousiaste que si sa mère venait de lui annoncer une corvée particulièrement déplaisante. On, c’est lui-même et les cinq autres membres qui constituent la fratrie Pentaghast : Aongas, l’aîné et le plus austère d’entre tous,  Cormag le financier, Duncan le futur auror, Keith le bienheureux et enfin cette mauviette de Murdoc qui se terrait toujours dans les jupes de leur mère.  Pourtant au fond des prunelles d’un vert printanier, Vesper détecte une once de fierté.  Par principe, elle s’élance d’un bond félin sur son aînée et lui colle une bourrade dans le nez. S’en suit une interminable mêlée de bras et de jambes avant que les deux compères ne s’arrêtent, couchés sur le dos, la poitrine haletante, riant au rare ciel azur de cet été maussade.  Leurs genoux écorchés se touchent légèrement. « T’as pas intérêt à nous faire honte pendant ta répartition. L’honneur du clan est en jeu et je permettrais pas qu’un de ses connards d’anglais viennent nous en remontrer. » Il a commencé sa tirade en frottant doucement le médaillon familial entre le pouce et l’index. « Alors écoute bien ceci. Quand le Magnard à Pointes viendra te renifler les orteils, tu te pisses pas dessus, ok ? C’est pas parce que t’es une fille… Mathair te le pardonnerait pas. Lors de sa répartition  à elle, elle l’a assommé avec une chaise et c’est comme ça qu’elle et p’pa sont tombés amoureux. » Pour toute réponse, la sorcière lui jette un regard oblique avant d’enfoncer son poing dans les côtes de son imbécile de frère. Puis, elle se demande si c’est douloureux de se faire arracher une jambe par un dragon. « T’inquiète Sin’, je ferais mieux que ça. Le dragon je le dompterai et on s’envolera au-dessus du château. Alors seulement,  j'épouserai la princesse ».

Fall

En guise de  Magnard à Pointes, Vesper se trouve assise sur un stupide tabouret.  Ses mains enfoncées dans ses poches, elle caresse le bois de sa baguette, une moue qui se veut boudeuse sur les lèvres. Elle aurait aimé faire montre de son courage dès les premières minutes de sa scolarité. Parfois, elle songe aux récits de la Grande Guerre. Ses parents étaient là, eux. Ils y avaient participé. Alors l’enfant regrette de ne pouvoir faire ses preuves suffisamment tôt. Frustrée, elle sent le tissu millénaire tomber devant ses yeux. Il prend ses aises et se met à papoter « Autant le petit dernier de la fratrie a été une plaie à répartir, autant ton cœur appartient aux fiers GRYFFONDOR ».  Sinéad tla siffle de la table des Serpentards tandis que ventre à terre, elle file s’asseoir aux côtés de Duncan qui lui ébouriffe gentiment les cheveux. En représailles, Vesper lui mord la main.  Keith et Murdoc sont à Serdaigle. Ils avaient toujours été catégoriques : même si leur benjamine est dotée d’un esprit vif, jamais elle n’aurait tenu en place dans la tour austère des bleus et bronzes.

Quand elle repense à ses temps poudlariens, Vesper les imagine comme des feuilles rouges et or qui tombent lentement sur le sol de sa mémoire. Nostalgie de ses jours insouciants dans le rigoureux climat écossais. Les brumes d’octobre, la neige de décembre et le parfum de la forêt interdite.  Elle se souvient également de la première fois qu’elle a écrasé un attrapeur au Quidditch en lui envoyant un cognard en pleine tête. Une chute de six mètres, du grand spectacle.  Puis de la première fois où elle s’est battue sur le terrain. Coup de dents, de battes et de pieds. Elle lui a cassé trois dents et s’en tire pour une année de retenue et une lèvre fendue. Ce grand troll de Bernard le méritait amplement.  Parfois le ciel étoilé de la Grande Salle lui manque ou le goût du jus de citrouille au petit matin quand ce n’est pas les longues nuits à écouter d’une oreille distraite les cours d’Astronomie en tentant de partager la chaleur d’une couverture avec sa conquête du moment.  Quitter le château a été un second déchirement. Alors que ses frères ont préférés rester sur le territoire européen, elle prit les voiles pour l’Université américaine de Pleatmouth. En cela, elle se différencie de sa fratrie. Seule fille, seule expatriée, vivant majoritairement sur ses économies durement acquises pendant les vacances scolaires. Etre indépendante toujours. Peut-être que si vous demandiez à ses parents ce qui l’a poussé à traverser un Océan pour faire ses études chez les Yankees, ils vous répondront avec un sourire énigmatique que les voies de Puck sont impénétrables mais qu’il y a éventuellement eu une combinaison entre un amour de collège et un dépliant reçu par hibou ce mois de juin là.

Winter

Il ne neige jamais en Californie. C’est pourquoi elle transplane si régulièrement, lorsque l’hiver s’en vient, vers les froides étendues de son île natale. Sa peau ne s’accommode d’ailleurs guère de l’ensoleillement et la chaleur la fait régulièrement suffoquer. Dès les premières semaines, ses exploits éthyliques, martiaux et sportifs lui permirent d’intégrer la confrérie des Elkpaw où elle côtoie les membres de son équipe de Quidditch de manière assidue. On lui reconnaît un esprit extrêmement combatif et volontaire une fois une batte en main. Il est d’ailleurs déconseillé de l’approcher dans ces moments-là. Bien que Vesper ait gagné en âge, on peut encore très certainement voir la petite fille dégingandée qui courrait sur la lande à la suite d’un troupeau de Verts Gallois en pensant pouvoir en adopter un et partir sauver royaume et princesse en sa noble compagnie.